Autoanalyse après terminaison et abandon du cadre psychanalytique: réflexions sur un fragment de travail d’autoanalyse
à la suite d’une terminaison traumatique.
Article paru sous le titre : Post-termination self-analysis and the relinquishment of the psychoanalytic frame :
thoughts on a fragment of self-analytic work following a traumatic termination,
Int J Psychoanal, (2021). vol.102. No.6 .1116-1137.
Traduit par Jenny Chan, relu par Céline Gür Gressot.
Richard ZIMMER
Département de psychiatrie, Centre médical Weill-Cornell, New York, États-Unis.
Résumé
Plusieurs mois après la fin traumatisante de mon analyse, je me suis engagé dans un travail d'auto-analyse au cours duquel j'ai pu retravailler les événements de la fin et leur signification en termes de mon histoire. Les différences fondamentales entre le processus d'auto-analyse et celui de mon analyse formelle m'ont amené à considérer comment la fin de l'analyse peut affecter le processus d'auto-analyse qui s'ensuit. Dans cet article, je me penche sur les aspects de la terminaison qui ont trait à la dissolution des liens symbiotiques avec l'analyste ; j'essaierai de montrer que l'abandon du cadre donne une impulsion à la fois à la consolidation et à la réélaboration d'une identification à l'analyste, ce qui peut permettre à l'analysant de développer une manière personnelle de penser l'inconscient qui diffère de celle de l'analyste. Je suggère en outre qu'il existe des limites inévitables au processus analytique qui se manifestent par le développement de bastions irréductibles, et que la dissolution du cadre à la fin de l'analyse offre une opportunité de résolution auto-analytique de ces bastions qui peut permettre une compréhension de soi au-delà de ce qui aurait pu être atteint dans le cadre analytique formel. Enfin, je propose quelques spéculations sur la façon dont ces processus ont pu se dérouler entre Freud et Fliess dans l'auto-analyse de Freud.
Mots clés : Terminaison, auto-analyse, cadre, bastion, traumatisme.
Introduction
L'acquisition de la capacité d'auto-analyse a longtemps été considérée comme un résultat souhaitable, voire un critère déterminant, d'une psychanalyse achevée avec succès (Hoffer 1950). Freud (1937c) a lié l'acquisition de cette capacité à l'intériorisation par le patient de l'analyste et de sa fonction d'analyse, alors qu'il déplorait la perte de l'analyse et de l'analyste à l'approche de la fin du traitement. Mais pour diverses raisons, le cours du développement de la fonction d'auto-analyse et la façon dont elle s'établit en interne n'ont pas fait l'objet d'une grande attention dans la littérature.
Dans cet article, j'espère atteindre deux objectifs. Premièrement, je présenterai un fragment de mon travail personnel d'auto-analyse, qui s'est produit plusieurs mois après la fin soudaine et traumatisante d'une analyse productive de plusieurs années. Je considère le rapport en lui-même comme une contribution à un nombre relativement faible - mais, je l'espère, croissant —de rapports de ce type dans notre littérature, qui pourraient stimuler un intérêt théorique supplémentaire pour l'auto-analyse, la manière dont elle est menée.
Dans un deuxième temps, je proposerai un modèle théorique sur l'impact de la rupture, et plus précisément de l'abandon du cadre psychanalytique, sur le processus auto-analytique. Pour ce faire, je m'appuierai sur les travaux de Willy et Madeleine Baranger (1983) et de José Bleger (1967), entre autres. J'essaierai de montrer que le renoncement au cadre donne une impulsion particulière non seulement à l'identification à l'analyste et à ses valeurs, à sa connaissance du fonctionnement de l'inconscient, à sa façon de penser et de travailler, à sa capacité d'observer et de comprendre, mais aussi à un remaniement de cette identification pour permettre la transformation de ces aspects intériorisés de l'analyste en une façon individuelle et personnelle d'observer, de penser et de travailler avec les manifestations de l'inconscient qui diffère de celle de l'analyste.
En bref, ce que j'espère montrer est que 1) la terminaison représente une crise pour l'analyste en vertu de la perte, non seulement de l'analyste en tant qu'objet, mais aussi du large éventail de fonctions que l'analyste remplit dans l'analyse clinique ; ces fonctions font partie inhérente du cadre. Après la terminaison, ces fonctions doivent être soit abandonnées, soit internalisées, soit assignées à d'autres objets ; 2) cette réorganisation peut aboutir à l'établissement d'une nouvelle fonction auto-analytique, avec sa propre méthode. Cette méthode s'inspire de certains aspects de l'analyse formelle avec l'analyste, tout en s'en distinguant nécessairement. 3) Ces méthodes sont très individuelles et personnelles, déterminées par de nombreux facteurs, y compris, mais sans s'y limiter, l'approche méthodologique de l'analyse formelle. 4) Au fur et à mesure que l'analysant progresse dans ses efforts d'auto-analyse, sa méthode d'auto-analyse peut servir à mettre en évidence ou à faire ressortir des aspects de sa vie intérieure différents de ceux mis en évidence dans l'analyse formelle. Cela se produit, au moins en partie, parce que l'auto-analyse est libérée de la participation de la collusion de l'analyste dans des bastions qui n'ont pas été, ou alors ne peuvent pas être, résolus entre le patient et l'analyste. (5) De tels bastions irrésolus ou insolubles sont inhérents au cadre de l'analyse et s'y ancrent souvent parce qu'ils sont issus d'attachements symbiotiques chez le patient, chez l'analyste ou entre les deux. Il est donc possible d'obtenir de nouvelles perspectives en libérant l'analysant de ses résistances collusives. Alternativement, ou en même temps, de telles perspectives peuvent être davantage influencées par l'enracinement de résistances non travaillées chez l'analysant. Ces nouveaux éclairages ne sont donc pas nécessairement "meilleurs" ou "pires" que ceux que l'on peut obtenir dans l'analyse formelle, mais différents, tout en ayant une potentielle valeur ajoutée.
Enfin, j'espère souligner comment mes propres expériences auto-analytiques illustrent certaines des idées théoriques que je propose. En même temps, je reconnais les limites de ce jusqu'matériel, à la fois en raison de la limitation inhérente aux observations auto-analytiques en tant que preuve pour des hypothèses théoriques plus larges (constatée par Freud (1950a [1987-1902], (Lettre 75), (1937c) même s'il s'est engagé dans une auto-analyse qui a donné lieu aux fondements de la théorie psychanalytique), et en raison du caractère traumatique, non planifié et soudain de la fin que je vais décrire. Je laisse au lecteur le soin d'examiner dans quelle mesure mes conclusions peuvent également s'appliquer à des analyses qui se terminent de manière plus conventionnelle, bien que je pense personnellement qu'elles le sont, et je propose une élaboration théorique expliquant pourquoi cela peut être le cas.
Un fragment de ma propre auto-analyse après terminaison.
Aspects pertinents du cadre
Un certain nombre d'années après la fin de mon analyse de formation, certains symptômes précédemment résolus sont réapparus et j'ai décidé de reprendre un traitement. J'ai consulté le Dr C., un analyste qui n'était pas affilié à mon institut d'origine. Nos instituts étaient réputés pour leurs divergences en matière d'orientation clinique et théorique. Bien que chacun de nous ait anticipé dès le départ que cela pourrait être une source problématique de mauvaise communication, nous avons rapidement établi une conversation dans lequel il y avait un respect présumé pour le domaine d'expertise théorique de l'autre et dans lequel nous nous engagions occasionnellement dans de brèves incursions éducatives dans lesquelles les nuances plus fines, d'une théorie, étaient expliquées par le plus "expert" d'entre nous. Il semble que cela ait permis de clarifier rapidement et efficacement de nombreux malentendus subtils entre nous et de poursuivre, de manière moins intellectualisée, l'exploration en cours. Les aspects plus formels du cadre étaient rarement une cause de perturbation. Une ponctualité partagée (et pour moi, quelque peu inhabituelle) à propos du temps et de l'argent empêchait l'un ou l'autre de ces sujets de devenir l'objet d'un examen minutieux dans le transfert. Le traitement a commencé quatre fois par semaine, sur le divan, et s'est poursuivi de manière productive pendant plusieurs années, au cours desquelles j'ai pu faire un certain nombre d'avancées significatives dans ma vie personnelle et professionnelle. Pendant les événements que je vais décrire, la fréquence avait été réduite à deux fois par semaine pendant environ deux ans, principalement pour des raisons pratiques, alors que je continuais à utiliser le divan.
Une fin traumatisante
Après plusieurs années de traitement, le Dr C., sans explication, a cessé de me présenter la facture mensuelle. La première fois que cela s'est produit, j'ai simplement calculé le montant dû et lui ai présenté un chèque ; sans commentaire, il a accepté mon paiement et, comme toujours, m'en a remercié. C'est alors devenu, sans autre discussion, notre nouvelle routine pour le paiement du traitement ; je n'ai plus jamais reçu de facture écrite du Dr C.
Au cours des mois suivants, cependant, j'ai eu l'impression que le traitement était au point mort ; j'ai parfois eu l'impression que le Dr C. était préoccupé ou non engagé, et que nombre de ses interventions étaient superficielles. Je devenais de plus en plus anxieux et irritable, me sentant souvent blessé et en colère contre le désintérêt apparent du Dr C. pour moi et notre travail. Un jour, j'ai remarqué que le Dr C. s'était assoupi au milieu de ma séance. Je me suis raclé la gorge bruyamment et lui ai fait remarquer qu'il semblait s'être endormi. Il s'est excusé et a expliqué en détail qu'il avait veillé tard la veille pour quitter la ville et s'occuper d'un ami qui était tombé très malade. Bien que l'explication soit logique, je me suis senti mal à l'aise face à l'immédiateté de sa réponse, au manque d'exploration et à la richesse inhabituelle et inutile de détails personnels qu'il semblait devoir révéler.
Au cours des quelques semaines qui suivirent, la situation se détériora rapidement. Un jour, alors que je me rendais à ma séance, j'ai vu le Dr C. dans la rue, marchant dans la direction opposée ; il semblait préoccupé et ne m'a pas remarqué, et il a été surpris de me trouver en train d'attendre à la porte lorsqu'il est retourné à son bureau, alors que j'étais déjà en retard pour ma séance. Un autre jour, j'ai reçu un message du Dr C. sur mon répondeur, me demandant pourquoi j’avais manqué ma séance ce jour-là, deux heures avant qu'elle ne soit prévue.
J'étais de plus en plus préoccupé par le fait que quelque chose n'allait pas du tout chez le Dr C. Il me semblait qu'il était peut-être en train de développer une démence. Mes efforts pour aborder ce sujet avec lui ont été frustrants ; il a qualifié mes préoccupations d’« imaginations » et m'a assuré qu'il avait récemment reçu un appel de son institut lui demandant d'assumer de nouvelles responsabilités d'enseignement. Craignant de plus en plus que quelque chose ne tourne mal, et m'inquiétant à nouveau de la signification de notre accord sur les honoraires, j'ai finalement demandé la raison pour laquelle le Dr C. avait cessé de me présenter une facture. Il m'a expliqué qu'un jour, il avait laissé les robinets de sa salle de bains ouverts, que le bureau avait été inondé et que sa papeterie avait été détruite ; à ce moment-là, il avait envisagé de "plier bagage" mais avait décidé de ne pas le faire ; il pensait que j'étais au courant. Je me suis rendu compte que nous étions dans une terrible impasse - j'étais maintenant convaincu que le Dr C. était en train de développer une démence, et le Dr C. semblait croire que je délirais. J'ai décidé de contacter un collègue senior respecté dans une autre ville pour le consulter sur la situation, et nous nous sommes rencontrés pendant plusieurs séances par téléphone. Sa réponse a été claire. « Le Dr C., m’a-t-il dit, a une démence et vous n’êtes pas psychotique ; il n'y a rien de bon à essayer de gérer la situation plus avant. Il m'a dit que je devais mettre fin à mon traitement immédiatement, par téléphone s'il le fallait. Et il m'a vivement conseillé de ne pas entreprendre immédiatement un traitement, que ce soit avec lui ou avec quelqu'un d'autre. "Vous avez eu assez d'analyse pour l'instant. Vous devez voler de vos propres ailes."
Un moment d'auto-analyse
Plusieurs mois après ces événements, j'avais du mal à écrire un article et je me sentais bloqué. C'était une expérience bien trop familière pour moi, harcelé par mon public imaginaire extrêmement sceptique et dédaigneusement critique, au point que rien de ce que je pouvais écrire ne pouvait convaincre ce public de voir les choses comme moi.
Un soir, ma femme et moi, tous deux fans de Stephen Sondheim, avions écouté un enregistrement de Into the Woods, une comédie musicale de Sondheim qui s'inspire de plusieurs contes de fées, dont le "Petit Chaperon rouge", pour mettre en lumière de puissants thèmes psychologiques universels. À la fin de l'enregistrement, j'ai dit à ma femme que j'avais été frappé par le fait que le grand méchant loup de l'histoire représentait en fait des aspects distincts de la grand-mère, le côté vorace, affamé et dévoreur de cette chère grand-mère malade à qui le bon et loyal Petit Chaperon rouge apportait un panier plein de nourriture. Ma femme a souri. Oui, m’a-t-elle dit, je suppose que c'est le cas. C'est tout à fait logique. J'ai poursuivi. Tu sais, le bûcheron avec sa hache est en fait un ajout ultérieur. Dans le conte de fées original, l'histoire se termine avec le loup qui mange le petit chaperon rouge et la grand-mère. Elle a de nouveau souri. "Est-ce vrai ?"
J'ai eu du mal à comprendre la réponse de ma femme. Ne connaissait-elle pas la version originale de l'histoire et exprimait-elle simplement sa surprise et son intérêt ? Ou lui avais-je dit quelque chose qu'elle savait déjà, peut-être même quelque chose d'universellement connu ? Était-elle en train de confronter gentiment mon hypothèse arrogante qu'elle ne savait pas ? Et étais-je même certain que ce que je lui avais dit était vrai ? Comment, en fait, pouvais-je le savoir ? Sans intention consciente, j'ai glissé du mode conversationnel au mode libre-associatif. "Quand j'étais enfant, quelqu'un, ce devait être un ami de mes parents, m'a offert un ensemble de livres de contes de fées. Chaque livre avait une couverture de couleur différente. Il y avait des illustrations en couleur détachables pleine page. "Ah", a dit ma femme. "Tu avais la collection de livres de contes de fées d'Andrew Lang."
J'ai été emporté par une vague d'exaltation et de gratitude. Ma femme, une amatrice de livres invétérée et bien informée, avait identifié mes livres perdus. Armé de cette information, je suis allé sur Internet et j'ai trouvé la collection. J'ai reconnu l'édition que j'avais, avec ses couvertures en cuir, ses illustrations en couleur et ses pages dorées. Il s'agissait maintenant d'une édition de collection ancienne, qui se vendait, à l'état neuf, à 3 000 dollars. Je me souviens qu'un jour, en cherchant ma collection, je me suis rendu compte qu'elle avait disparu, probablement transmise à un autre enfant ou donnée à une œuvre de charité par ma mère qui avait supposé que j'étais devenu trop grand pour elle. J'ai dit à ma femme combien j'étais étrangement excité à l'idée qu'elle ait pu identifier ces livres oubliés depuis longtemps. "Ta mère n'avait pas réalisé que tu possédais quelque chose de grande valeur ; elle l'a donnée sans réfléchir. Tu l'as récupérée, ou du moins le sentiment que tu avais quelque chose de valeur." Ce que ma femme a dit était vrai, et clairement pertinent pour mon blocage de l'écrivain telle était sans doute son intention, mais il y avait plus que cela. En fait, je me disais que je n'étais pas certain d'avoir réellement possédé ces livres ou de les avoir seulement imaginés. Le fait de trouver et de reconnaître les livres en question m'a non seulement assuré de leur valeur, mais aussi que ce que j'avais vu et dont je me souvenais était réel et non le fruit de mon imagination. Et, dans mes efforts pour écrire, ce n'est pas seulement que mon public imaginaire critique ait reçu mes idées comme n'ayant aucune valeur particulière, mais qu'il les ait en fait ressenties comme étant farfelues et folles.
Lorsque j’ai expliqué cela et que j'ai réalisé que ce n'était pas seulement le sentiment d'être en possession de quelque chose de valeur, mais plutôt le sentiment d'avoir un sens de la réalité intact, qui avait été restauré, une série d'images visuelles de la dernière année de mon analyse avec le Dr C. se sont pressées dans mon esprit, et se sont rapidement rassemblées en un récit de cette année-là. Sans que je le sache à l'époque, le changement inopiné de notre routine de facturation et de paiement avait été un signe précoce de la détérioration de la santé du Dr C. Mon réflexe a été de m'adapter sans problème à ce changement, en assumant discrètement un léger surcroît de responsabilités, pour me protéger ainsi que le Dr C. contre toute remise en question de la signification de ce changement, en encourageant mon propre déni (et, peut-être, également celui du Dr C. également) de tout changement qui aurait pu se produire. Néanmoins, au fur et à mesure que les mois passaient, j'enregistrais, au moins de manière préconsciente, d'autres signes de changement inquiétant ; cela se manifestait par mon sentiment que l'analyse était au point mort, mon anxiété croissante et le retour, avec une intensité croissante, de certains anciens symptômes.
Un peu d'histoire personnelle
Lorsque j'étais un jeune enfant, mon père, qui, plus jeune, était ambitieux, charismatique et plein de vie, a développé une maladie de plus en plus grave, affectant à la fois sa santé physique et son état mental. Cette maladie s'est poursuivie jusqu'à la fin de sa vie. Cela a commencé par des crises de colère occasionnelles, apparemment non provoquées et paranoïaques, parfois dirigées contre moi. À la fin de sa vie, les effets cumulatifs de la maladie, sa négligence de longue date, de sa santé physique, son retrait interpersonnel relatif, et la qualité souvent bizarre de ses relations, étaient devenus les principaux éléments de mon expérience de lui. Ma mère a, jusqu’à la fin, farouchement nié la détérioration de son état, et a subtilement imposé une attitude de déni similaire dans la famille. Elle prenait parti contre moi lorsque mon père s'en prenait à moi, soulignant que j'avais peut-être provoqué l'attaque et qu'il était important de traiter mon père avec respect. En même temps, elle a joué un rôle de plus en plus important dans les activités professionnelles de mon père, lui permettant de continuer à travailler jusqu'à ce qu'une grave maladie physique l'amène à prendre sa retraite alors que j'étais un jeune adulte.
À l'époque où j'étais adolescent, le climat émotionnel de mon foyer, du moins pour moi, était caractérisé par un sentiment de morosité lié à la perte du père charismatique et excitant dont je me souvenais vaguement dans ma toute petite enfance. En même temps, il y avait le danger omniprésent de malentendus et de mauvaises communications qui pouvaient rapidement dégénérer en colère explosive. Après l'école, je me dépêchais de faire mes devoirs et je partais pour de longues promenades solitaires dans une grande librairie de quartier où il n'y avait pas de pression pour faire un achat, j’y passais des heures entières plusieurs fois par semaine.
Une auto-analyse plus poussée
Au fur et à mesure que le nouveau récit de la dernière année de mon analyse se précisait pour moi, j'ai également commencé à comprendre comment l'analyse avait été chargée par la mise en actes complexe d'événements traumatiques de mon enfance et de mon adolescence et par mes efforts pour faire face à ces événements. Bien qu'à la fin, la participation du Dr C. à cette mise en acte ait été principalement due, je pense, à son incapacité, des éléments du cadre mis en place dès le début de notre travail dans lequel il participait activement je suppose, ont préparé le terrain. Je pense qu'il a dynamiquement participé, ont préparé le terrain. Nos "incursions éducatives", par exemple, étaient pour moi une sorte de défense préventive contre la possibilité de tensions, de malentendus et de désaccords entre nous qui pourraient devenir insupportables et remplis d'agressivité, comme ils l'avaient été avec mon père. Ensemble, le Dr C. et moi avions mis en place une structure où de tels désaccords pouvaient être trop facilement réduits à des désaccords intellectuels, auxquels on pouvait facilement remédier par une éducation mutuelle plus poussée, en évitant trop souvent une élaboration et un travail minutieux. Cela me rappelait mon retrait dans le monde de l'intellect lorsque j'étais adolescent, où, à l'instar des incursions éducatives de mon analyse, j'étais libre de "parcourir" les idées à ma guise sans aucune pression pour "acheter". Ma réaction au changement de la routine de facturation était également un mode d'adaptation que j'avais développé en tant qu'enfant, dans lequel je faisais face aux changements de la routine familiale, ou de la qualité de la supervision parentale (dont les implications pouvaient être dérangeantes si elles étaient examinées de trop près), en reprenant en douceur et sans commentaire les responsabilités que d'autres avaient abandonnées et en créant l'illusion qu'en fait aucun changement réel n'avait eu lieu. Le coût pour moi de ces deux manœuvres défensives, a été tel que je me suis permis (ainsi que le Dr C.) de nier un problème sérieux qui se préparait jusqu'à ce qu'il devienne une répétition inéluctable du traumatisme précoce de la détérioration mentale inexorable de mon père.
Lorsque mon propre déni a commencé à s'effondrer et que j'ai commencé à parler de mes préoccupations au Dr C., la confirmation simultanée de ces préoccupations par ses actions et leur déni par ses paroles a suscité un transfert plus inquiétant, celui d'une mère qui avait un besoin urgent de me voir la rejoindre dans son déni. Cela constituait, pour moi, une attaque implicite contre mon sens de la réalité. Un an plus tard, alors que je luttais contre le syndrome de la page blanche, mes fonctions inconscientes et auto-analytiques se sont emballées lorsque ma femme et moi avons écouté par hasard Into the Woods. J'ai pu voir comment j'étais, pour ainsi dire, le petit chaperon rouge diligent et aimant, essayant de prendre soin de ma mère/grand-mère/analyste aimée, tout en faisant l'expérience, de manière clivée, qu'elle/il voulait m'avaler et qu'elle/il était une menace pour mon existence psychique. Alors que je discutais avec ma femme de mes observations sur le Petit Chaperon Rouge, j'ai eu une expérience de transfert momentané avec elle dans laquelle je ne pouvais pas distinguer son intérêt pour mes pensées d'un mépris caché pour ma pensée et mes connaissances. C'était une expérience courante pour moi lorsque j'étais enfant, lorsque mes observations quotidiennes de la réalité extérieure menaçaient de bouleverser le déni sur lequel reposait l'équilibre familial, et que ces observations étaient rejetées comme étant celles d'un enfant naïf, bien qu'intellectuellement précoce.
Ma confusion quant à la validité de mes propres perceptions et souvenirs s'est poursuivie alors que j'essayais de répondre à ma propre question : "comment puis-je savoir cela ?". La question elle-même avait été une réponse à une expérience transférentielle momentanée, quelque peu paranoïaque, de la réponse de ma femme à mes commentaires sur la "vraie" histoire du Petit Chaperon Rouge. Je me souvenais vaguement de la collection spéciale de contes de fées, mais je n'étais pas certain qu'il s'agissait d'un faux souvenir résultant sans doute de la disparition soudaine et passée inaperçue de la collection. Non seulement les livres avaient disparu, mais c'était comme s'ils n'avaient jamais été là. Ma femme, et ma vérification ultérieure sur Internet, ont irréfutablement validé ma mémoire. Ma femme, consciente de mon syndrome de la page blanche, s'est risquée à une interprétation qui liait mon symptôme au souvenir retrouvé des livres - l'idée que j'avais quelque chose de valeur (les livres, mes idées) qui était traité (par ma mère et par le public potentiel de mon article) comme s'il n’avait que très peu de valeur. Bien qu'il y ait une part de vérité dans cette interprétation, c'était un raté par rapport à ce qui était en train de se passer à ce moment précis – ce n'était pas tant la valeur de mes idées, mais la validité de ces idées, et ma propre santé mentale pour les avoir eues, que je remettais en question.
Plus tard, en me remémorant ma consultation avec le collègue senior, je me suis souvenu du moment où il m'avait suggéré de signaler la situation du Dr C. à son institut d'origine, et j'avais ressenti une énorme poussée d'anxiété, déchiré entre ma fureur à l'égard du Dr C. qui refusait de m'aider et mon désir de protéger le Dr C. dont l'état se détériorait. Comment pourrais-je signaler son état sans savoir comment ce rapport serait traité, ni comment m’assurer que le Dr. C. serait traité avec le respect et le soin appropriés ? Je me suis rendu compte qu'à ce moment-là, j'étais déchiré entre deux sentiments intenses à l'égard du Dr C., l'un d'inquiétude et d'attention envers lui en tant que père dont l'état se détériorait, l'autre de fureur envers lui en tant que mère qui nie. J'ai compris que ces sentiments étaient tous deux dirigés vers le même Dr C. et que j'étais en quelque sorte un touriste accidentel dans la situation tragique de ce dernier. Je me souviens avoir ressenti le dilemme moral dans lequel j'avais été placé comme intolérable.
Cependant, après réflexion, quelque chose ne correspondait pas à cette compréhension. En fait, en tant qu’enfant, c'était contre mon père que j'avais conscience d'être en colère, et ma mère était l'objet de ma sollicitude et de ma sympathie. Je me suis demandé si ce n'était pas l'usage que je faisais du clivage, plutôt que sa direction, qui avait été ravivé pour moi dans cette reviviscence de mes expériences antérieures. Une image de mes parents réunis à la table du dîner, ma mère apportant son soutien aux activités professionnelles de mon père, flottait dans mon esprit. Le clivage je pense, a maintenu ces deux-là dans mon esprit, l'un étant une victime malheureuse et l'autre l'auteur de ma propre situation malheureuse ; et cela a servi à écarter de ma conscience une image d'eux en tant que couple, engagés l'un envers l'autre, à maintenir leur famille à flot et à éduquer leurs enfants, faisant face aussi vaillamment qu'ils le pouvaient à leur propre situation tragique, peut-être aucun d'eux n'étant capable de comprendre pleinement son ampleur.
Ce travail d'auto-analyse a entrainé des répercussions frappantes. Le cafard dans lequel j'étais depuis des mois a semblé se dissiper. J'ai recommencé à travailler sur mon article avec un sentiment de frustration et de difficulté bien moindre. En même temps, j'ai été frappé par la qualité de cette expérience d'auto-analyse. Elle semblait être venue spontanément et sans se faire prier. Elle s'est appuyée sur la compréhension de moi-même et du fonctionnement de l'inconscient que j'avais obtenue lors de mon analyse formelle, et pourtant, elle différait à la fois par son contenu et son processus de ce qui s'était passé lors de cette analyse. Il est impossible de savoir si cela se serait produit si le Dr C. était resté en bonne santé et si mon analyse avec lui s'était poursuivie jusqu'à une fin plus axée sur le processus, mais je savais que c'était un travail que j'avais fait, sinon complètement par moi-même, du moins sans le Dr C. J'ai commencé à m'interroger sur la transition entre l'analyse formelle et l'auto-analyse, et sur les transformations qui pouvaient se produire au cours de cette transition.
L'auto-analyse après la fin du traitement - quelques considérations cliniques et théoriques
Problèmes méthodologiques dans l'étude de l'auto-analyse
La relative rareté de la littérature consacrée à l'étude de l'auto-analyse après la fin du traitement est davantage due à des problèmes méthodologiques inhérents qu'à un manque d'intérêt. L'observation directe de l'auto-analyse par un observateur externe, que ce soit lors d'une visite de suivi avec l'analyste initial ou par une tierce personne dans le cadre d'une recherche qualitative, favorise inévitablement la régression (Ticho 1967) et remobilise les transferts qui ont ensuite un effet déformant à la fois sur la pensée auto-analytique elle-même et sur la façon dont elle est rapportée. Néanmoins, de telles études peuvent fournir des informations utiles. Par exemple, Falkenstrom et al. (2007) ont étudié de nombreuses évolutions cliniques possibles après la fin d'une psychothérapie à orientation psychanalytique, et ont constaté que, parmi celles-ci, seule l'auto-analyse était positivement corrélée à une amélioration clinique continue. Kantrowitz (2012), quant à lui, a constaté que l'amélioration progressive après la fin de la psychothérapie ne dépendait pas nécessairement du développement d'une capacité d'auto-analyse ou de sa pratique en cours. Les résultats de Conway (1999) ont soulevé des doutes quant au lien entre le deuil de l'analyste et le développement de l'auto-analyse, suggérant que les deux ne sont ni positivement corrélés ni contingents l'un par rapport à l'autre.
Les rapports d'auto-analyses à la première personne (y compris les miens) présentent différents problèmes. Comme Calder (1980) le fait remarquer, les rapports d'analystes sur leurs propres auto-analyses destinés à la littérature peuvent exposer ces analystes à des préjudices personnels et professionnels en révélant des domaines sensibles de leur vie émotionnelle et en fournissant des informations à leurs patients qui peuvent sur-stimuler, et/ou guider la direction des fantasmes de transfert des patients. Néanmoins, de telles révélations personnelles (par exemple, Calder [1980] ; Griffin [2004] ; Guntrip [1996] ; Silber [1996]) attestent du large éventail de méthodes personnelles d'auto-analyse, et de sa valeur clinique constante pour ceux qui la poursuivent. Le compte-rendu et l'analyse détaillés par Freud de plus de 50 de ses propres rêves (Anzieu 1975) a, bien sûr, constitué un puissant élan pour une grande partie de l'élaboration de la théorie psychanalytique.
La crise de la terminaison et le renoncement au cadre psychanalytique
L'idée de Freud selon laquelle l'auto-analyse est établie par l'intériorisation par le patient des aspects de l'analyste à travers le deuil est restée importante dans notre compréhension de la terminaison et de l'auto-analyse. Des contributeurs ultérieurs ont cependant souligné que l'établissement de la fonction auto-analytique peut être plus complexe que cela. De Bernstein et De Fondevilla (1989) relient la consolidation de la fonction auto-analytique au deuil de l'analyste lors de la terminaison, mais notent qu'elle "prend parfois le dessus sur le mode de pensée de l'analyste, et à d'autres moments crée une nouvelle forme de pensée" (p. 385) (…) "Une fois la séparation réalisée, le patient découvre qu'il doit résoudre des tendances opposées en lui-même, celle d'imiter l'analyste et celle de le défier" (p.388). J’estime que ces tendances opposées trouvent un compromis dans l'auto-analyse après terminaison, mais je veux accorder une attention particulière à la dissolution des liens symbiotiques avec l'analyste dans l'établissement de la "nouvelle forme de pensée". Je pense que l'idée de "défier" l'analyste a une connotation différente, peut-être celle du rejet de certains aspects des identifications du moi précédemment atteintes avec l'analyste. En cela, je crois que je suis plus proche de Loewald (1988), qui fait référence au lien entre les processus d'internalisation et d'individuation par rapport à l'analyste autour de la terminaison. Bien qu'il se concentre davantage sur l'internalisation que sur l'individuation, Loewald insiste sur la perte de la structure de la relation analytique, en plus de la perte de l'analyste en tant qu'objet, et de façon distincte. Il suggère que la double qualité de cette perte (c'est-à-dire l'objet et la structure) est liée à l'internalisation et à l'individuation simultanées de l'analyste. C'est ce point que j'espère développer.
Le cadre est la structure qui est mise en place pour permettre au processus psychanalytique de se dérouler, tout en offrant une protection à l'analyste et à l'analysant contre les dangers potentiels de ce processus. Une fois le processus enclenché, l'analyste est amené à remplir de multiples fonctions au sein de ce processus. A la fin du processus, l'analysant est confronté à la perte de ces fonctions, qui lui ont été nécessaires pour poursuivre les activités d'analyse. La question de savoir si - et comment - l'auto-analyse continue ou si on y renonce, est soulevée. Une nouvelle structure - une méthode d'auto-analyse qui permet à l'auto-analyse de se poursuivre en l'absence d'apport analytique formel - doit être établie ; chaque fonction individuelle que l'analyste a remplie doit être soit supprimée, soit remplacée par un ou plusieurs nouveaux objets, soit internalisée. Ces fonctions comprennent : 1) la stimulation par l'analyste d'une émotion intense en vertu de son surinvestissement en tant que personne et des souhaits régressifs stimulés par la situation analytique ; 2) l'analyste en tant que lieu de rassemblement de souhaits conflictuels multiples afin que ces souhaits et leur interrelation puissent être examinés à travers l'exploration du récit d'une relation en cours avec un seul individu ; 3) l'analyste en tant qu'auditeur qui oriente constamment le discours à la fois loin de la réalité extérieure et vers l'expérience intérieure, et loin du jugement et vers la compréhension ; 4) l'analyste en tant qu'interprète du contenu et de la résistance ; 5) l'analyste en tant qu'auditeur qui s'identifie simultanément à l'expérience du patient et la regarde de l'extérieur ; et 6) l'analyste en tant que terrain d'essai sûr pour de nouveaux comportements et modes de gestion des souhaits conflictuels. (Ticho [1967] limite à trois le nombre de fonctions de l'analyste qui doivent être intégrées à la fonction auto-analytique : l'association libre, l'écoute et l'interprétation, bien qu'elle se limite aux fonctions dont le destin est l'internalisation, laissant de côté celles qui sont plus susceptibles de connaître d'autres destins).
En examinant mon échantillon des fonctions de l'analyste, il apparaît clairement que certaines fonctions se prêtent plus facilement que d'autres aux différents destins possibles. La fonction de lieu de rassemblement, par exemple, ne peut pas vraiment être remplacée par l'identification, et il est très exigeant pour tout objet autre que l'analyste de remplir cette fonction ; se passer de cette fonction est la résolution la plus probable. Les expériences momentanées ou fragmentaires de transfert avec d'autres objets persisteraient (comme mon incapacité momentanée à distinguer entre l'intérêt et le mépris de ma femme pour mes connaissances), et la fonction de l'analyste consistant à noter de telles expériences et à encourager leur élucidation serait plus susceptible d'être internalisée. L'interprétation du contenu est plus facile à intérioriser pour la plupart des analysant que l'interprétation de la résistance. L'interprétation de la résistance est plus susceptible d'être abandonnée, confiée à d'autres objets dans la vie de l'auto-analysant, ou, comme le note Kramer [1959], la dissolution des résistances peut se poursuivre de façon autonome mais inconsciente, sous l'impulsion des fonctions synthétiques et intégratives du Moi, plutôt que par l'interprétation explicite de résistances spécifiques. Les forces, les faiblesses et les besoins cliniques individuels (par exemple, la modulation de l'affect par rapport à l'approfondissement de l'intuition) et la disponibilité d'objets qui peuvent remplacer les fonctions perdues de l'analyste contribuent tous à déterminer la nature de la nouvelle méthode d'auto-analyse hautement individuelle qui émerge.
La multiplicité des méthodes d'auto-analyse
Les rapports directs et les études de recherche qualitative sur l'auto-analyse confirment l'idée que chaque auto-analysant a sa propre méthode auto-analytique individuelle. Kantrowitz (2012), dans une étude sur les activités auto-analytiques d'anciens analysants, note le large éventail de facteurs qui jouent dans les méthodes individuelles développées. Elle délimite également plusieurs domaines du travail auto-analytique dans lesquels il existe une variation individuelle particulière, y compris ce qu'elle appelle les "lieux d'auto-observation" - des moyens par lesquels l'individu place son expérience interne à l'extérieur de lui-même pour faciliter un auto-examen à distance - tels que les rêves, l'écriture ou l'utilisation d'interlocuteurs, auxquels j'ajouterais les symptômes, le travail créatif et les réponses au travail artistique, entre autres. J'ajouterais également aux domaines de la variabilité individuelle particulière le degré et la nature de la discipline et de la structure que l'auto-analysant s'impose. Griffin (2004) rapporte l'écriture de cas fictifs dans lesquels il est lui-même le patient fictif, dont il imagine ensuite la vie intérieure de l'extérieur. Calder (1980) décrit sa propre approche très disciplinée dans laquelle il note les rêves, les souvenirs, les rêveries et les symptômes, et les associations à ceux-ci sur une longue période, les examine et tente de comprendre leur interrelation. Silber (1996), stimulé à la fois par des expériences traumatiques dans sa vie et par une anxiété symptomatique, a systématiquement associé à ses rêves, retrouvant dans le processus des souvenirs anciens et obtenant un nouvel aperçu des épisodes non analysés dans chacune de ses deux analyses formelles. Guntrip (1996) rapporte un travail d'auto-analyse stimulé par la persistance d'un symptôme demeuré pratiquement inchangé après des analyses formelles successives avec Fairbairn et Winnicott. Il a passé en revue les notes détaillées qu'il avait prises sur chaque séance au cours de ces analyses, et a également puisé dans ses rêves actuels, reconstruisant les aspects de ses transferts avec chaque analyste, et les actes qui se sont produites entre eux.
Kramer (1959) fait la distinction entre l'"association libre" d'une "fonction auto-analytique" et l'"association contrôlée" d'une "auto-analyse active". Dans la mesure où ma propre méthode d'auto-analyse est moins structurée et plus spontanée, je la qualifierais de plus proche du fonctionnement d'une fonction auto-analytique que les auto-analyses actives de Calder, Silber ou même Griffin. Dans ma méthode personnelle, je trouve que mon contact quotidien avec les patients crée une toile de fond permanente d'introspection, car j'écoute simultanément leurs associations et je puise dans ma propre expérience interne pour essayer de comprendre leur vie intérieure. Cette introspection de fond est ponctuée d'expériences de coalescence en un schéma cohérent plus large sur mon propre monde intérieur. Ces moments de coalescence peuvent être déclenchés par des rêves, des symptômes ou des expériences interpersonnelles avec mes objets actuels, dans lesquels je réalise qu'il existe une distorsion de type transfert. En réfléchissant à mes rêves, je trouve que les nuances de l'expérience affective manifeste et les représentations des configurations relationnelles des objets sont plus utiles que de focaliser sur les rêves comme des rébus ou sur les désirs qui y sont représentés. Les idées concernant ces moments de coalescence me viennent souvent sous la forme d'une série d'images visuelles de moi-même en relation avec les autres. Ces idées sont ensuite relativement faciles à verbaliser à un objet extérieur si je le souhaite.
Il y a donc autant de formes différentes d'auto-analyse qu'il y a d'auto-analystes. Le mélange complexe de câblage psychique de base, d'expériences précoces, d'identifications à l'analyste, et de modes préférés de représentation de l'expérience interne qui entre dans le développement de ces styles individuels dépasse le cadre de cet article. Mais ce que je veux souligner, c'est que, tout comme les hypothèses théoriques de base et les méthodologies techniques des différentes écoles de pensée psychanalytiques mettent en avant des domaines spécifiques de l'expérience intrapsychique au détriment d'autres domaines (Zimmer 2017), il en va de même pour les différentes méthodes et styles de travail auto-analytique. La méthode individuelle, quels que soient les facteurs qui la déterminent, oriente les directions que peut prendre l'auto-analyse.
Les bastions et le cadre ; le "roc du processus" et la terminaison
Pour mon objectif, qui est d'examiner de plus près comment l'abandon du cadre affecte le processus auto-analytique après la fin de l'analyse, je souhaite définir le cadre d'une façon qui va un peu au-delà de sa définition la plus étroite, limitée aux arrangements concernant le lieu, le temps et l'argent, la règle fondamentale et la délimitation des rôles et responsabilités spécifiques de l'analysant et de l'analyste dans la situation analytique. J'élargis le concept de cadre pour inclure tous les aspects invariants de la situation analytique, explicites ou implicites, sur lesquels les deux parties se sont mises d'accord. Cela inclut les façons convenues de prêter attention, de penser et de parler de ce qui émerge dans le déroulement de l'analyse - les méthodes et procédures incontestées de l'analyse. Je pense que cette définition plus large se rapproche davantage de ce qui est abandonné dans la structure de la situation analytique à la fin d'une analyse clinique réelle, même si elle est moins utile que la définition plus étroite pour définir une sorte d'idéal platonique de la psychanalyse.
Le cadre de chaque analyse, lorsqu'il est considéré de cette façon, est individuel et unique au couple analytique spécifique. Certains aspects du cadre, bien sûr, visent à l'uniformité avec d'autres analyses cliniques et, de cette façon, servent de mesure de ce qui constitue une analyse de traitement. Mais le cadre est établi, et ses règles sont sujettes à interprétation et à application, par deux individus. Il n'est pas rare que les modes d'interprétation et d'application des règles incluent une certaine mesure d'arrangement et de compromis mutuels. Les hypothèses, les croyances et les modes de pensée incontestés propres à chaque couple analytique font aussi inévitablement partie du cadre. Certains aspects de chaque cadre font appel à des sources extérieures au couple analytique, y compris des principes techniques associés aux théories psychanalytiques. Mais les détails du cadre et sa mise en œuvre s'appuient sur des aspects des personnalités du patient et de l'analyste, et sur la relation fondamentale entre eux, qui s'institutionnalise entre eux, en les incorporant dans une sorte de mini-structure dans un cadre "immuable". Par exemple, les "incursions éducatives" dans mon analyse avec le Dr C. et ma ponctualité inhabituelle concernant le temps et l'argent étaient des moyens de contourner des sources potentielles de conflit entre moi et le Dr C. qui avaient certainement une signification personnelle pour moi et probablement pour le Dr C., et ils sont restés un aspect ego-syntonique stable de notre cadre tout au long de l'analyse. Cela a simultanément facilité l'exploration de certains domaines de ma vie mentale tout en permettant à d'autres de sortir du champ de l'examen analytique.
Je crois que ces mini-structures apparaissent fréquemment, peut-être même de façon inévitable, dans les analyses cliniques, même s'il est possible d'imaginer une situation psychanalytique idéale sans elles. (En effet, l'exécution technique "idéale", totalement pure, d'une analyse clinique, même si elle était possible, serait un évènement à part entière, dans laquelle l'adhésion à une procédure technique idéalisée prendrait le pas sur l'établissement d'une relation humaine entre patient et analyste). Ces mini-structures constituent une forme de bastion, tel que décrit par Baranger, Baranger et Mom (1983), qui placent l'identification, l'interprétation et la résolution de ces structures au centre du processus psychanalytique. A la fin de l’analyse, le renoncement à ces mini-structures incorporées dans le cadre peut avoir pour effet de libérer le discours auto-analytique de l'analysant des effets de la participation collusive de l'analyste à ces structures. Cela peut permettre à ces structures, et aux contenus contre lesquels elles servaient à se défendre, de faire l'objet d'un examen plus approfondi et de parvenir à une résolution plus poussée.
En plus de ces aspects dynamiquement déterminés du cadre abandonné, il y a des aspects "génériques" du cadre qui sont abandonnés lors de la terminaison. Ceux-ci contribuent également à la transformation du processus analytique formel en processus auto-analytique. Par exemple, le rôle plus central que les images visuelles ont pris dans mon auto-analyse a à voir non seulement avec ma tendance personnelle à faire un usage libéral de l'imagerie visuelle comme mode de représentation de l'expérience, mais aussi avec les caractéristiques inhérentes à la situation analytique. Dans la situation analytique formelle, les associations doivent être communiquées entre l'analyste et l'analysant, et la communication verbale est le mode préétabli. L'analyste peut prêter attention aux aspects non verbaux de la communication de l'analysant, mais il ne peut pas voir les images visuelles qui défilent dans l'esprit de l'analysant. Ces images doivent être traduites en mots afin d'être communiquées. Certaines nuances visuelles sont inévitablement perdues dans cette traduction ; et des idées qui sont puissamment convaincantes dans leur forme visuelle rapide peuvent perdre de leur puissance par la traduction de l'expérience interne "perçue" en un récit mutuellement généré entre l'analysant et l'analyste. Cela n’exclut pas, bien sûr, que certaines intuitions peuvent devenir plus convaincantes lorsqu'elles sont mises en mots pour être communiquées à l'analyste. (Ticho [1967] note également que les associations libres dans l'auto-analyse ne nécessitent pas de verbalisation, mais il conçoit cela principalement comme un obstacle à l'auto-interprétation, alors que je conçois aussi la nature potentiellement facilitante de cette différence). Pour moi, certains aperçus sont alors plus disponibles en auto-analyse, où la communication est intrapsychique/intersystémique plutôt qu'interpersonnelle. Dans le même temps, d'autres intuitions ont pu être moins, plutôt que plus, disponibles.
Les travaux de Bleger (1967) et de Baranger, Baranger et Mom (1983) (ci-après dénommés "les Baranger") traitent de la centralité de la tension entre le processus et le non-processus dans l'analyse clinique, bien qu'ils définissent le non-processus de différentes manières et qu'ils adoptent des approches techniques très différentes pour l'examen de cette tension.
Pour les Baranger, le "non-processus" n’équivaut pas aux aspects invariants donnés d'une analyse présentée dans le cadre convenu, mais à quelque chose qui se produit dans l'analyse, et qui, paradoxalement, fait partie d'un processus plus large. Dans le « non-processus » selon les Baranger, certains contenus mentaux échappent au processus d'émergence dans le champ bipersonnel par le biais d'actes de collusion au sein du couple analytique, destinés à éviter l'émergence de ces contenus psychiques et leur soumission à l'examen analytique, ce qui a pour effet de bloquer le processus par lequel cette émergence se produirait. Cet envahissement du processus par le « non-processus » est ce qu’ils appellent le "bastion". Il est souvent organisé autour d'un fantasme partagé sur la nature du processus analytique ou sur les rôles respectifs de l'analysant et de l'analyste dans ce processus. Pour les Baranger, l'analyste doit prendre de plus en plus conscience de l’invasion du processus par le non-processus comme un élan à prendre un "second regard" sur le champ bipersonnel dans le but de découvrir, d'aborder et de résoudre le bastion.
Pour Bleger, le "non-processus" désigne les constantes convenues dans la situation analytique. Ces constantes comprennent notamment, mais pas exclusivement, les accords sur le temps et l'argent, et la règle fondamentale. Le concept de "non-processus" pour Bleger est co-extensif avec le concept de "cadre", qui est son sujet d'étude. Comme moi, cependant, Bleger utilise une définition plus inclusive du "cadre". Il soutient que, parallèlement au cadre explicitement suggéré par l'analyste et accepté par le patient, un second cadre opère silencieusement qu'il appelle le "monde fantôme" du patient. Ce "monde fantôme" est constitué d'éléments du monde interne du patient ancrés dans l'expérience symbiotique, qui sont immuables et essentiels à son identité et à son sens de la réalité. Parce que ces éléments du "monde fantôme" du patient, basés sur la symbiose, sont incorporés dans le cadre, et deviennent une partie du non-processus, le cadre devient un lieu de rassemblement pour les éléments psychotiques de la personnalité. Il est important de noter que Bleger note que ce "monde fantôme" inclut (mais n'est bien sûr pas limité) les identifications qui découlent des affiliations institutionnelles : « les institutions fonctionnent toujours à des degrés variés comme délimitations de l’image du corps et comme le noyau de base de l'identité » (1967, p. 257). Bleger envisage l'existence d'un tel "monde fantôme" parallèle, qui apparaît dans les expériences symbiotiques de l'analyste, mais ne s'attarde pas sur ses implications cliniques en détail.
Comme j'ai défini le cadre au sens large, il comprendrait non seulement les arrangements pratiques et la règle fondamentale, mais aussi le " monde fantôme " du patient et celui de l'analyste, ainsi que les bastions non traités qui s'incorporent au cadre à mesure qu'ils se forment et s'ancrent comme des aspects invariants de la situation analytique. Les bastions qui se forment comme des produits de l’intersubjectivité collusive d'éléments des mondes fantômes respectifs du patient et de l'analyste, basés sur des identifications symbiotiques pour les deux, seraient particulièrement réfractaires à la résolution dans l'analyse. J'ai considéré ce phénomène dans ma discussion d'un rapport de cas clinique de Chused (2016). Le cas de Chused, contrairement au mien, n'était pas un cas de fin traumatique mais plutôt un cas de fin planifiée d'une analyse dans laquelle, malgré l'amélioration clinique du patient, la gratitude exprimée pour le travail et les rapports de suivi de l'auto-analyse en cours, l'analyste se sentait insatisfait, se remettait en question et était incapable d'accepter la gratitude du patient ou d'accorder beaucoup de valeur à son travail auto-analytique. Dans ma discussion, j'ai suggéré que les analyses cliniques atteignent une sorte de " roc du processus " (Zimmer 2016), quand
un bastion se forme entre le patient et l'analyste, qui ne peut pas être identifié ou résolu, mais qui ne peut être institutionnalisé que comme une mise en œuvre continue, parce que le sentiment de cohérence personnelle et d'identité de l'un ou des deux participants serait trop menacé par la dissolution du bastion. (p.882)
Dans une telle circonstance, la capacité de l'analyste à jeter un "second regard", qui pourrait normalement conduire à l'identification et à la dissolution du bastion, peut être limitée par le "monde fantôme" des contenus mentaux issus des liens symbiotiques précoces de l'analyste. Et provenir en outre de ses identifications institutionnelles (y compris les croyances théoriques et les styles de pensée fermement ancrés) susceptibles de préserver de ses expériences d'omniscience par la fusion avec un objet omniscient fantasmé. De tels bastions irrésolubles pourraient également incorporer des styles de pensée habituels qui sont façonnés à la fois par des facteurs constitutionnels et des expériences précoces de symbiose et de contenance (Bion 1962, 1967), et des expériences précoces de la situation œdipienne telle que décrite par Britton (1989). Je tiens à souligner que c'est une situation que je ne considère pas comme une défaillance de l'analyste, mais plutôt comme une condition de l'humanité inéluctable de l'analyste, une potentialité universelle dans toutes les analyses.
Le retrait de la participation collusive de l'analyste à préserver ces bastions, de la nouvelle organisation auto-analytique construite qui commence avec la terminaison de l'analyse formelle peut alors, chez certains analysants, contribuer de manière significative à la capacité de l'analysant à mener l'auto-analyse après terminaison en des lieux qui avaient été moins accessibles dans le cadre analytique formel. Comme je l'ai suggéré précédemment (Zimmer 2016) :
Les postures défensives qu'il aurait été impossible d'abandonner lorsque la stabilité non seulement de soi, mais aussi du partenaire et de la relation entre eux, semblait menacée [par leur abandon] pourraient bien être plus faciles à aborder de manière réfléchie en privé et en l'absence du besoin de confirmation du partenaire. (p.882)
Je voudrais souligner ici que l'analysant en fin d'analyse procède avec la précieuse compréhension de l'inconscient et de son fonctionnement qu'il a obtenue dans l'analyse formelle, tout en procédant avec une méthode personnelle nouvelle et différente, et que la compréhension du contenu et du fonctionnement de l'inconscient est en effet séparable de la méthode spécifique que tout individu, couple d'analystes ou groupe organisé de psychanalystes peut utiliser pour les explorer.
LaFarge (2019) aborde également l'impact sur l'abandon du cadre dans la terminaison analytique, bien qu'elle mette l'accent sur les angoisses qui sont remuées lorsque le cadre est en train d'être abandonné, plutôt que sur la réorganisation qui se produit après la terminaison effective. Elle met l'accent sur les différents niveaux de l'expérience symbiotique et sur la façon dont les fantasmes de symbiose de la pensée et du corps sont mobilisés lors de la terminaison. Je me suis principalement concentré sur le premier niveau. Il est possible que le second niveau devienne relativement moins accessible, plutôt que plus accessible, dans la réorganisation qui suit la fin effective de la relation, puisque la proximité physique réelle et privée avec l'analyste est abandonnée.
Discussion - l'auto-analyse et la phase post-terminale
Je vais maintenant revenir à mon matériel clinique pour essayer de montrer comment certains aspects de mon élaboration théorique sont illustrés par ce matériel, ainsi que pour souligner ce qui n'est pas démontré par mon matériel clinique mais qui relève davantage de la spéculation théorique inspirée par mon expérience.
Émergence de la méthode auto-analytique après la fin de l'analyse formelle
L'un de mes objectifs, en présentant mon processus d'auto-analyse en détail, était de donner au lecteur une idée de ce qu'est ce processus pour moi, et en quoi il diffère du processus d'autres personnes qui ont fait état d'auto-analyse dans la littérature. Mon processus personnel s'inspire de certaines réalités de ma vie (je suis un analyste qui passe la majeure partie de sa semaine à voir des patients ; je suis marié à une autre analyste ; je suis particulièrement exposé dans mon travail intellectuel à une variété d'orientations psychanalytiques théoriques). Ce processus façonné par mon style de pensée, a des racines à la fois constitutives de mon expérience : par exemple, ma tendance à aller et venir entre les formes de pensée de libre association et celles de preuve et d'argumentation, et ma préférence pour l'imagerie visuelle comme mode principal pour établir des liens entre et parmi les idées et les observations. Ce processus a été influencé par des expériences de vie ainsi que par l'exposition à des idées, analytiques et autres, au cours de ma formation.
Le rythme de ce processus diffère de celui d'autres auto-analystes plus disciplinés et certainement du processus analytique formel. Le fragment d'auto-analyse que j'ai décrit s'est produit au cours des quelques jours qui ont suivi mon échange avec ma femme sur le "Petit Chaperon Rouge" ; À ce moment, cela provoqua sur moi une frénésie d'activité auto-analytique consciente, suivie d'une phase de plusieurs semaines où j'ai progressivement affiné et détaillé ma compréhension de moi-même à un rythme plus tranquille. Au fur et à mesure que la frénésie progressait, je me rendais de plus en plus compte qu'elle avait été précédée d'une période de travail plus silencieux, inconscient ou préconscient, alors que je m'efforçais de mieux comprendre mon blocage de l'écrivain dans l'espoir de le surmonter.
Ma méthode différait à bien des égards de celle suivie dans mon analyse formelle ; la perte de la structure des séances régulières permettait au rythme tout à fait différent de mon auto-analyse de façonner davantage l'organisation de mes pensées. Même si je glissais souvent dans un mode de pensée libre-associatif, l'effort pour maintenir cette pensée, pour comprendre l'impulsion des interruptions dans une telle pensée, et pour examiner les connexions temporelles de mes associations libres si centrales dans mon analyse formelle façonnait l'organisation de mes pensées sur mon inconscient d'une manière différente. En outre, ma transformation plus directe d'images visuelles en idées sans traduction immédiate en communication verbale m'a permis de me concentrer davantage sur les tonalités des sentiments qui étaient omniprésents dans ma vie antérieure et sur le souvenir d'expériences affectives, par opposition à l'attention plus étroite portée à la contiguïté temporelle des associations dans mon analyse avec le Dr C., ce qui a faussé l'idée que je me faisais des désirs, des dérivés de pulsions et des défenses contre eux. Le Dr C. est resté une figure de transfert puissante dans mon auto-analyse, mais j'avais maintenant le sentiment que cette relation constituait une partie de mon passé dynamique, tandis que des expériences de transfert intenses et immédiates se produisaient, de façon plus fugace, fragmentaire et moins "rassemblée", en relation avec ma femme. Néanmoins, ces expériences m'ont donné un élan considérable vers une meilleure compréhension de ma vie intérieure.
La résolution des bastions non résolus ou irréductibles
Deux bastions qui étaient restés irrésolus dans mon analyse formelle ont été démêlés au cours du fragment d'auto-analyse que j'ai décrit. Je ne peux évidemment pas savoir si ces bastions auraient pu être démêlés si le Dr C. n'était pas tombé malade. De plus, mon hypothèse selon laquelle la persistance de bastions non résolus est une caractéristique commune ou omniprésente dans les analyses bien conduites et terminées de manière satisfaisante n'est pas démontrée par mon matériel (et serait, en effet, impossible à démontrer avec tout matériel de cas individuel). Je crois cependant que c'est le cas, et je demande au lecteur d'envisager la possibilité que ce soit le cas.
Les deux bastions auxquels j'ai fait référence - le bastion des " incursions éducatives " et le bastion de la " facturation et du paiement " - ont fonctionné de différentes manières dans l'analyse formelle, mais tous deux étaient plus faciles à démêler dans l'auto-analyse. Cela s'explique en partie par le fait que les fonctions qu'ils remplissaient dans la relation analytique n'étaient plus nécessaires, et qu'il était plus facile de surmonter mes résistances personnelles à comprendre ces bastions qu'il ne l'aurait été de surmonter la résistance collusive.
Le bastion des incursions éducatives avait pour moi la signification inconsciente d'être un garde-fou contre les attaques redoutées du Dr C. en tant que mon père, avec lequel de petits malentendus pouvaient précipiter des rages paranoïaques qu'il valait mieux éviter. Je ne sais évidemment pas s'ils avaient une telle signification inconsciente pour le Dr C. Mais même si ce n'était pas le cas, ce bastion a également rempli une fonction utile dans l'analyse formelle, comme beaucoup de bastions de ce type, je crois. Le Dr C. et moi-même sommes arrivés à l'analyse en apportant des identifications institutionnelles profondes avec des organisations qui, dans la communauté analytique locale plus large que nous partagions, pouvaient souvent être caractérisées par une concurrence intense les unes avec les autres. Les "incursions" ont fait de nous une paire quelque peu immunisée contre les processus primitifs des grands groupes qui existaient dans cette communauté plus large, et ont fait appel à ce que je crois être notre amour commun de l'apprentissage continu et de l'ouverture aux idées nouvelles. L'inclusion de ces incursions dans notre cadre a établi une nouvelle organisation entre nous qui a favorisé l’évitement des sources potentielles de conflit découlant de cette situation externe plus large dont nous faisions tous deux partie. Bien sûr, comme c’est le cas dans les bastions, les significations personnelles de ces conflits entre nous ont échappé à l'examen analytique. Détaché de la fonction de facilitation qu'elle remplissait, ainsi que de la participation collusoire du Dr C. et de la fonction protectrice que les incursions remplissaient pour notre relation, et sous la pression d'essayer de démêler un symptôme douloureux, j'ai pu "voir" ce que ces incursions mettaient en œuvre entre nous. J'ai pris conscience d'un puissant transfert paternel négatif que ces incursions ont permis d'éviter. Le démantèlement de ce bastion a contribué à la compréhension intégrative plus large que j'ai pu avoir de la manière dont les événements des derniers mois de mon travail avec le Dr C. m'avaient affecté, et de la relation entre ces événements et mon blocage de l'écriture.
Le bastion de la facturation et du paiement, et sa dissolution, ont fonctionné d'une manière quelque peu différente. Le bastion a été établi lorsque le Dr C. a abîmé son papier à lettres et a cessé de me présenter une facture, et que j'ai assumé sans commentaire la responsabilité de calculer mon paiement mensuel au Dr C. Ici, nous avons partagé un désir de nier que ce changement avait une quelconque signification, et un fantasme mutuel que, quoi qu'il se passe avec le Dr C., notre travail commun pourrait continuer comme avant. Au fil des mois, je pense que le déni du Dr C. a perdu beaucoup de sa qualité dynamique et est devenu plus simplement une caractéristique de son processus de démence progressive. Mais je suis resté en contact avec le Dr C., et ce que j'ai mis en œuvre, c'est mon désir de protéger ma mère en soutenant son déni de la maladie de mon père et en la déchargeant du fardeau de me fournir une structure et une supervision. La dissolution de ce bastion a commencé avant, et non après, la fin de mon analyse formelle ; elle a été la réponse à ma prise de conscience croissante de l'effondrement du cadre de l'analyse formelle alors que le Dr C. devenait de plus en plus inattentif, confus et incapable de suivre nos séances programmées. Ma soudaine prise de conscience de notre déni collusif est restée un traumatisme relativement non métabolisé jusqu'à des mois plus tard. Sur le moment, cependant, cela a été l'aspect le plus douloureux de la terminaison, lorsque les expériences d'avoir été trahi et sacrifié, et d'avoir été séduit et/ou contraint à collaborer avec le déni (qui avait été le moyen de mon sacrifice, à la fois avec ma mère et avec le Dr C.), ont évoqué en moi des sentiments de colère intense dans le contexte d'un transfert maternel douloureux que le bastion avait servi à écarter.
La méthode d'auto-analyse personnelle facilite une nouvelle compréhension des bastions non résolus, ce qui permet de mieux les comprendre.
Des mois après ma consultation avec mon collègue senior, dont j'avais suivi le conseil d'arrêter immédiatement le traitement avec à la fois soulagement et culpabilité, un vieux symptôme - le blocage de l'écrivain - était revenu. Mon activité d'auto-analyse, dont j'avais fait une sorte de pause depuis la fin de mon traitement, s'est remobilisée alors que je luttais pour surmonter ce symptôme gênant. Dans ce contexte, un contact fortuit avec l'histoire du Petit Chaperon Rouge a déclenché une chaîne d'événements internes qui m'ont permis de comprendre un aspect différent et important de mon blocage de l'écriture. Au début de cette activité d'auto-analyse, ma femme a assumé brièvement certaines des fonctions de l'analyste absent, et j'ai vécu avec elle une expérience de transfert transitoire qui a joué un rôle important dans cette auto-analyse. En même temps, cette activité auto-analytique m'a incité à réélaborer certaines mises en acte de mon analyse avec le Dr C. et m'a permis d'intégrer davantage l’insight obtenu lors de ce travail. Ces mises en actes soit avaient à voir avec l'intégrité du cadre (le bastion de la facturation et du paiement), soit devaient être incorporées dans le cadre (à la fois le bastion de la facturation et du paiement et le bastion des incursions éducatives) du fait qu'elles sont co-construites, qu'elles ont une valeur défensive mutuelle et qu'elles n'ont pas été résolues dans l'analyse formelle. Bien que mon analyse ait été interrompue prématurément par la maladie du Dr C., et que cette maladie ait joué un rôle dans l'établissement et l'enracinement du bastion de la facturation et du paiement, je suggère à nouveau que de tels bastions non résolus font partie de nombreuses analyses, si ce n'est de toutes, même celles qui ne sont pas interrompues prématurément ou de manière traumatisante, et que leur résolution peut fonctionner de manière similaire après l'interruption de l'analyse, comme ce fut le cas pour la mienne.
Freud, Fliess, et les phases de l'auto-analyse de Freud
L'auto-analyse de Freud a joué un rôle central dans la naissance de la théorie psychanalytique. Bien qu'un examen approfondi de son déroulement dépasse le cadre de cet article, Anzieu (1975) a réalisé une étude intégrative érudite qui rassemble les événements de la vie de Freud, son auto-analyse et le développement de ses théories. Le recueil de lettres de Freud à Fliess ((Freud (1950a [1887-1902]) retrace le rôle important, intellectuel et émotionnel, que Fliess a joué dans cette auto-analyse.
La relation de Freud avec Fliess n'était pas une analyse formelle. En tant que telle, il n'y avait pas de cadre explicitement convenu, (bien que les lettres suggèrent certainement que leur discours et la relation qu’il implique avaient une structure implicite sous-jacente). Le rôle de Fliess n'était en aucun cas défini comme interprétatif. Néanmoins, un transfert puissant était à l'œuvre (Kris 1954) et constituait une force motrice dans cette auto-analyse ; et certaines façons dont l'évolution de la méthode d'auto-analyse de Freud, ainsi que la dissolution des hypothèses incontestées qu’ils partageaient au sujet de la façon dont ils envisageaient ensemble le fonctionnement du psychisme, ont abouti à des processus qui présentent une similitude frappante avec le phénomène que je décris dans cet article.
Anzieu divise l'auto-analyse de Freud en trois phases : une phase "prodromique" prolongée, caractérisée par une auto-analyse intermittente et fragmentaire, suivie de "l’auto-analyse systématique" - une période d'introspection intense de ses rêves et de leurs associations, qui dure de juin à novembre 1897. L'auto-analyse systématique semble avoir été initiée par la prise de conscience de Freud qu'un blocage dans son écriture se produisait en relation avec Fliess, et que le symptôme semblait "avoir pour but de gêner nos relations " (Freud (1950a [1887-1902]), Lettre 66). Cette phase se caractérisait par des écrits plus fréquents et plus détaillés à Fliess sur ses expériences auto-analytiques et sur les théories qu'il élaborait à partir de celles-ci. Ces théories étaient systématiquement mises en relation avec les théories de Fliess. En février 1898, Freud annonce à Fliess « J’abandonne l’auto-analyse pour me consacrer au livre sur les rêves" (Lettre 83). Bien que Freud ait poursuivi sa correspondance avec Fliess jusqu'en 1902, Fliess a cessé de fonctionner comme un public nécessaire pour que Freud puisse poursuivre son travail. Freud continua à s'auto-analyser, bien que de façon plus intermittente ; et il y eut un changement dans la façon dont le processus auto-analytique était poursuivi. C'est dans cette troisième phase que je vois des phénomènes analogues à l'auto-analyse post-terminale qui est le sujet de cet article.
Après avoir déclaré que son auto-analyse systématique était "abandonnée", Freud s'éloigna de plus en plus de la focalisation exclusive sur les rêves et leurs associations, et commença à s’intéresser à des symptômes - l'oubli de noms - Freud (1950a [1887-1902]), Lettres 94 et 96), d'un souvenir écran (Freud 1899a), d'un épisode de déréalisation (Freud 1936a) et même des éléments de son transfert à Fliess (Anzieu 1975, p. 321). Cette évolution de la méthode d'auto-analyse vers une plus grande prise en compte des phénomènes de la vie mentale éveillée, et des manifestations de l'inconscient dans celle-ci, éloignait inévitablement Freud de la robuste théorie qui était alors au centre de sa compréhension des rêves, et de la métaphore neurophysiologique sous-jacente au cœur de cette théorie ; la réflexion de Freud devenait en effet de moins en moins centrée sur l'interface entre l'esprit et le corps, et davantage sur le fantasme, la défense et l'impact des expériences de la petite enfance sur la vie mentale adulte. Fliess avait toujours encouragé Freud dans ses théories sur les connexions corps-esprit et pensait que ses propres théories sur la périodicité, sur la relation du nez avec la fonction sexuelle féminine et sur le fondement anatomique de la bisexualité constitutionnelle étaient à la fois cohérentes et synergiques avec la pensée de Freud (Kris 1954, 34-39).
La distance théorique croissante entre Freud et Fliess (et l'intolérance de Fliess à l'égard de cette distance) a finalement conduit à la dissolution définitive de leur relation, précipitée en grande partie par leur différend sur la bisexualité constitutive et ses vicissitudes dynamiques, ainsi que sur la propriété de ce concept (Anzieu 1975, 385-387). Le point de vue de Freud selon lequel les identifications et autres contenus psychiques sont le motif du refoulement de l'un ou l'autre côté de la prédisposition bisexuelle était en conflit avec l'idée de Fliess selon laquelle c'était le sexe déterminé anatomiquement qui était à l'origine du refoulement. Mais cela reflète l'idée de l'essence fondamentalement biologique de la vie mentale. Fliess, de son côté, avait déclaré que : "Celui qui lit la pensée autrui n'y trouve que ses propres pensées" (Anzieu 1975 p. 693). Bien que l'on ne puisse évidemment que deviner les significations personnelles de cette brouille entre Freud et Fliess, j'émets l'hypothèse que l'intensité du sentiment autour de ces différences théoriques suggère la dissolution d'une symbiose de pensée entre eux qui était devenue inhérente à un accord tacite - une sorte de bastion - selon lequel leurs théories seraient toujours complémentaires et jamais en opposition, et que chacun tirerait profit des idées de l'autre - et en serait crédité, probablement par le biais d'une publication conjointe anticipée de leurs résultats. Au fur et à mesure que Freud avançait dans sa trajectoire de fondation d'une science de l'esprit distincte où la biologie jouait un rôle moins central, la rupture de leur lien symbiotique était à la fois une conséquence inévitable de cette trajectoire et nécessaire à sa poursuite.
Résumé et conclusions
La fin d'une analyse formelle crée une crise qui a inévitablement un impact sur la fonction auto-analytique de l'analysant en fin d'analyse. Bien que Freud ait mis l'accent sur l'intériorisation par l'analysant de certains aspects de l'analyste à travers le deuil, la consolidation et la transformation de la capacité d'auto-analyse à la fin de l'analyse est plus complexe que cela. Je me suis concentré dans cet article sur les aspects de cette transformation associés à l'abandon du cadre de l'analyse formelle. Ce faisant, j'ai utilisé une définition large du cadre qui englobe non seulement les arrangements pratiques de l'analyse et les rôles convenus de chaque membre du couple analytique, mais aussi de nombreuses autres caractéristiques de la situation analytique qui sont invariantes, par accord explicite ou implicite entre le patient et l'analyste. Il s'agit notamment des bastions qui se sont enracinés et qui, pour une raison ou une autre, ne peuvent être interprétés et résolus.
De nombreux facteurs, tant constitutifs que dynamiques, entrent en jeu dans le style et la méthode d'auto-analyse de l'analysant. Il existe diverses méthodes d'auto-analyse qui peuvent être développées. L'abandon de la situation analytique formelle et de son cadre implique à la fois la perte de certaines fonctions analytiques et la libération de certaines contraintes imposées par le cadre désormais abandonné. Dans certaines situations, la libération de ces contraintes peut rendre plus facile l'analyse des bastions résiduels. En fonction des capacités de l'individu, de sa situation personnelle et de son niveau d'élan continu pour la compréhension de soi et le changement, des domaines de croissance et de compréhension de soi qui n'auraient pas pu être atteints dans le cadre analytique formel peuvent être atteints par l'auto-analyse après la fin de l'analyse. Ce que l'analysant obtient de l'analyste, c'est surtout une compréhension de la nature du fonctionnement de l'inconscient et de ses manifestations, plutôt qu'une méthode particulière pour l'observer ; en fait, après la fin de l'analyse, la méthode utilisée dans la situation analytique formelle n'est plus disponible. Lorsque l'analysant consolide sa propre méthode auto-analytique qui supplante la situation analytique formelle abandonnée, cette compréhension peut devenir plus disponible pour son utilisation créative et son élaboration.
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